TELETHON 2002

Texte de la dictée

Requiem pour une société moribonde

Si l'apathie semble érigée au rang de valeur nationale, nous le devons, notamment, à la télévision hertzienne, câblée ou retransmise par satellite. Elle est devenue le cubilot d'une spolation intellectuelle et morale dans lequel toutes les générations se trouvent amalgamées.
De même que la pâtée engraisse les gorets, le tube cathodique affourage nos esprits. Faut-il d'abord qu'on en ait un ! Or, la question reste posée puisque tout laisse apparaître, chez certains, sinon l'absence d'encéphale du moins une cachexie prononcée des neurones.
Observons un téléspectateur.
Notre sujet est avant tout béat devant l'oeil-de-boeuf qui dégurgite des glaires d'inepties ; une bouillie prédigérée chargée de toxines et de phéromones éthérées au pouvoir aussi délétère que le haschich. Réceptif sans le savoir aux hologrammes subliminaux et aux cacophonies pitoyables il acquiesce aux échos ânonnés par des présentateurs dyslexiques et pénétrés de leur importance.
Vautrés devant la fenêtre grande ouverte sur le spectacle d'un monde dont il absorbe, avec appétit, le stupre et les vilenies, il se repaît d'une pâture insipide et contaminée de miasmes qui ont dénaturé notre culture dérivant à vau-l'eau, au profit d'une invasion venue d'outre-Atlantique.
La télévision pérennise le culte du narcissisme et de l'idéôlatrie à travers des émissions animées par des présentateurs atteints de mégalomanie aiguë et, pour certains, de crétinisme rédhibitoire.
Elle se substitue à des séances de psychiatrie au rabais, elle est une tribune livrée aux pervers voyeuristes, elle stimule l'hystérie juvénile, elle vénère l'indigence intellectuelle et s'assoit sur l'éthique.
Elle s'appuie sur les borborygmes de présentateurs schizoïdes, à la voix évaporée, pour flatter toutes les tares humaines jusque et y compris le sadomasochisme.
Elle est le support de publicités destinées à flatter l'amoralité de l'espèce humaine.
Non contente d'abêtir son auditoire, elle lui dicte de surcroît les opinions qu'il doit avoir et exerce un racket téléphonique par lequel des innocents crédules se laissent alpaguer.
Peut-on vraiment s'étonner, alors, qu'avec une télévision de cet acabit pour directeur de conscience notre société soit devenue moribonde ?

Retour à la page d'acceuil